Vendredi après-midi peu après 17h au camp d'été travailliste près d'Oslo, les jeunes viennent de se rassembler pour s'informer de l'attentat qui a dévasté peu auparavant le cœur de la capitale norvégienne. Emma, 18 ans, se dirige avec son amie Aase vers l'endroit où sont plantées les tentes, raconte-t-elle sur son blog «L'enfer d'Utoeya».
Attentats de Norvège«Tout d'un coup, on a vu tout le monde courir, personne ne disait rien mais tout le monde courait. J'ai attrapé Aase et je lui ai dit cours , et alors tout le monde s'est mis à crier courez! courez! courez!», écrit-elle. «Puis j'ai entendu quelque chose qui évoquait un feu d'artifice et j'ai pensé bon Dieu qui est l'imbécile qui fait ça. Alors ont suivi les coups de feu. D'abord un, puis plusieurs».
«J'ai joint mes mains et j'ai prié Dieu»
Elle se rue alors à travers bois pour atteindre la rive. «Tout le monde a décroché son téléphone, appelé la police mais sans parvenir à joindre quelqu'un. Tout le monde appelait à la maison sans avoir de connexion», se souvient-elle. Profitant du fait que le tireur se dirige vers l'autre côté de l'île, la jeune militante se cache avec son amie et deux camarades.
Elle commence à échanger des SMS avec d'autres amis répartis dans l'île. Ceux-ci lui expliquent que le tireur est en uniforme de police, et qu'il se dirige désormais dans sa direction. «J'ai joint mes mains et j'ai prié Dieu», écrit la jeune femme. Le chef de la jeunesse travailliste lui conseille par SMS de s'enfuir à la nage.
«J'ai vu l'explosion de son crâne en deux morceaux»
En se rendant sur la rive, elle découvre un ami à elle, tué d'une balle dans la tête. Emma convainc alors ses amis de s'enfuir avec elle en nageant d'abord vers le large, puis vers une île voisine. Le petit groupe se déshabille, puis commence à nager derrière elle.
«À ce moment-là, je me suis retournée sur le dos en regardant vers l'île, et je vois le salopard. Il a un uniforme de police, il est blond, blanc de peau, je vois la casquette de police, je vois l'arme. C'est alors qu'il nous voit, et qu'il nous met en joue». «Pan, quelqu'un devant moi est touché, je vois le sang gicler, je me mets à nager encore plus vite». Le tueur s'en prend désormais à ceux qui sont encore sur la rive.
Elle nage de toutes ses forces
«Je vois un ami qui s'apprête à plonger et, au même moment, il est abattu. À cette distance, je pouvais entendre et voir. Deux balles, dans la tête. J'ai vu l'explosion de son crâne en deux morceaux», explique la jeune fille. «J'ai crié: Nagez ou courez! mais ça ne servait à rien, il y avait tellement de bruit. L'hélicoptère (d'une télévision, ndlr) au-dessus de nous et le salopard qui tirait».
Emma nage de toutes ses forces, en pleine panique. Elle vient à la rescousse d'une amie épuisée, qu'elle prend sur ses épaules, et continue à nager. «J'ai pensé en moi une brasse pour maman, une pour papa, une pour petit frère, une pour Robin», raconte l'adolescente, qui réalise qu'elle est blessée au bras. «Derrière moi, j'entendais toujours les coups de feu, les cris, j'entendais le salopard rire quand il tirait, je l'entendais crier vous ne vous en tirerez pas! ».
Continuant à nager, elle interpelle alors un garçon d'une dizaine d'années non loin. «Il me voit et me répond papa est mort ». «J'ai répondu: ne te retourne pas, nage pour papa (...) et il me dit: je croyais que la police était gentille...» Après de nouveaux efforts, ils aperçoivent alors un bateau. D'autres rescapés sont à bord. «Tous pleuraient, et tous criaient. Nous étions enfin en de bonnes mains».
(L'essentiel Online/AFP)
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