L’achat d’un appartement a été synonyme de faillite personnelle pour Jeannot Wagner (nom changé par la rédaction). «J’ai toujours bien gagné, mais mon épouse est tombée malade et ne pouvait plus travailler. Ensuite, deux de mes enfants ont commencé à travailler et je ne recevais plus l’allocation familiale», raconte ce Luxembourgeois. Au final, il avait 180 000 euros de dettes et huit prêts à rembourser. «J’avais un crédit auprès de chaque banque. C’était facile, ils m’ont demandé si j’avais des dettes, j'ai dit non et ils n'ont jamais vérifié», raconte-t-il.
Qu'est ce que la faillite civile? La faillite civile est destinée aux personnes privées surendettées dont la situation est irrémédiablement compromise. C'est-à-dire celles dont le redressement semble illusoire à court, moyen et long terme. Elle permet de réduire le capital de la dette. Et passe par une liquidation des actifs du débiteur. En clair, si celui-ci a une voiture, elle sera vendue et la somme répartie entre les créanciers. Le reste de la dette sera éteinte. L'ancien débiteur pourra ainsi prendre un nouveau départ. La faillite civile fait déjà partie de l'arsenal législatif de nos pays voisins, Allemagne, Belgique et France. Actuellement, au Luxembourg, les cas de surendettement peuvent se régler à l'amiable ou par voie judiciaire, laquelle peut déboucher sur une saisie sur salaire. La loi sur la faillite civile «La législation actuelle ne permet pas aux gens dans les cas les plus critiques de surendettement de repartir de zéro. Avec les risques de dépression, suicide, que cela peut induire», note Christian Schumacher, de la Ligue médico-sociale (LMS). Or, sur le bureau des associations, les dossiers de surendettement s'empilent. À la LMS, qui gère le nord et le centre du pays, «nous sommes bien partis pour atteindre les 500 nouveaux dossiers en 2011, comme l'an dernier». Dans le sud, Inter-Actions en est déjà à 148. Alors, les associations attendent impatiemment l'introduction de la faillite civile. Celle-ci permettra à un particulier d'effacer son ardoise. La loi est en traitement à la Chambre où le député CSV Jean-Paul Schaaf a hérité du dossier après le décès de Mill Majerus, rapporteur d'origine. «Si tout va bien, nous pourrons voter la loi avant fin 2011», dit Jean-Paul Schaaf.Au final, Jeannot Wagner ne savait plus combien d’argent il devait aux banques. «Par peur, je n’ai plus ouvert le courrier et j’ai ignoré le problème. Ce qui a été une grosse erreur.» Un jour, il n’avait qu’une solution: faire appel à la Ligue médico-sociale qui conseille des personnes surendettées. «C’était assez humiliant parce que je ne savais pas ce qui m’attendait», se souvient-il. Et la surprise a été grande quand son conseiller a calculé la somme qu'il allait devoir rembourser – une somme évidemment beaucoup plus importante que prévu.
«On m’a regardé de travers»
Wagner n'a alors pas eu d’autre choix que de vendre son appartement et d’en louer un autre. Fini les sept ans de galère. Entre temps, le nombre de ses amis a diminué: «J’ai pris mes distances. Juste deux ou trois amis connaissent mon histoire». Mais il n'a pas pu cacher son problème devant ses collègues, tenus au courant quand une des banques a demandé la saisie de son salaire auprès de son employeur. «On m’a regardé de travers, certains faisaient des commentaires stupides. Cela m’a blessé», dit-il. Ses enfants connaissait aussi ses difficultés financières: «Notre frigo était vide à cette époque. Ce n’était pas possible d’aller au restaurant ou de faire des sorties en famille».
Depuis quelques années, Jeannot Wagner n’a plus de dettes. «Aujourd’hui, je vais bien. Je vis comme je l’avais toujours souhaité en faisant attention à mes dépenses». Et il applaudit l’introduction de la faillite civile. «Peut-être que je n’aurais pas dû vendre mon appartement si ça avait déjà existé il y a quelques années».
Kerstin Smirr/L’essentiel Online
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