Jeudi, 27 Janvier 2011 12:08
Internet : Il ne faut pas dramatiser le passage à l'IPv6
Le bug, tant attendu pour le passage à l'an 2000, interviendra-t-il cette année ? L'apocalypse est proche... ou plutôt "l'IPcalypse". Internet ne tiendrait-il quà une adresse IP ?
L'adresse IP est une succession de chiffres attribuée à chaque appareil connecté à Internet pour l'identifier. Seulement, avec l'explosion du nombre de connexions (deux milliards d'internautes), le stock d'adresses IP dans leur version actuelle (v4) est sur le point de se tarir. D'où une crainte redondante que tous les opérateurs ne passent pas à temps à la nouvelle version (v6). Christophe Pousset, responsable de l'équipe technique chez ActivNetworks, fait le point sur ce passage et dédramatise la situation. Nouvel Observateur : Qui est concerné par ce passage de l'IPv4 à l'IPv6 ? Christophe Pousset : Avant tout, ce sont les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) qui sont concernés puisqu'ils fournissent à chaque utilisateur une adresse IP.
NO : Les particuliers doivent-ils se doter, de manière urgente, de machines compatibles avec l'IPv6 ? C. Pousset : Non. Tous les PC, depuis Windows Vista, sont compatibles IPv6. Pour les particuliers, tout va continuer à fonctionner sans modification de leur part. Les opérateurs vont fournir, si besoin via des évolutions des Box, des passerelles qui se prendront en charge à la fois le réseau du domicile (en IPv4) et le réseau du FAI (en IPv4 ou IPv6). NO : Que se passera-t-il s'il un particulier ne s'équipe pas ? C. Pousset : Rien. Les plans d'adressages v4 et v6 vont continuer de cohabiter, comme c'est le cas aujourd'hui. Par exemple, on peut indifféremment se connecter sur le serveur de Google en IPv4 ou en IPv6. Ne seront potentiellement impactés que les personnes qui tentent de se connecter à des sites exclusivement en IPv6 et qui n'auraient pas d'appareils convertissant leurs IP. Mais cette situation ne devrait pas se produire avant plusieurs années. D'ici là, on peut parier que les opérateurs auront tous mis en place des passerelles de conversion IPv4/IPv6. Ce mécanisme sera aussi transparent pour les clients que l'est l'interconnexion entre les réseaux RATP et SNCF pour le RER... NO : Pourtant, on entend parler d'IPcalypse... C. Pousset : Il ne faut pas dramatiser la situation. On peut faire une comparaison avec le pétrole : nous savons que le pétrole va se raréfier, donc devenir de plus en plus cher. Simultanément, le pétrole ne disparaitra pas du jour au lendemain, et des moyens alternatifs sont progressivement mis en place et cohabitent. On imagine très bien des voitures électriques prendre la même autoroute que les voitures à essence. C'est pareil pour les adresses IPv4, malgré une différence de taille : le stock d'adresses est fini et limité, mais celles-ci ne s'usent pas et sont indéfiniment réutilisables. NO : Les entreprises sont-elles concernées par ce passage ? C. Pousset : Les entreprises n'ont pas besoin de passer en IPv6 pour leurs réseaux internes. Le RFC 1918 [descriptif des règles de normalisation des réseaux IP privés, NDLR] permet aux entreprises d'avoir en interne autant de réseaux qu'elles veulent en utilisant un adressage de type IPv4, ces réseaux restant isolés avec une capacité virtuellement illimitée. De plus, les entreprises qui ont besoin de beaucoup d'adresses sont de très grosses entreprises qui ont la capacité de créer et administrer de telles infrastructures. Par conséquent, en termes d'adressage, mais aussi en termes de capacité de mise en œuvre, les entreprises disposent des ressources leur permettant de s'affranchir de toute difficulté.
NO : Pour autant, cela induit-il des coûts importants ? C. Pousset : Non. L'essentiel des coûts devrait être supporté par les opérateurs, et nous sommes très loin d'une situation de rupture comme celle que l'on a par exemple connu lors du passage en l'an 2000. On peut comparer la situation de l'époque à une obligation de basculer de manière massive dans un nouveau monde, qui a nécessité une révision systématique de l'existant. Cette bascule a donc généré des coûts importants en raison de son ampleur, même si elle s'est effectuée sans désordre. A l'opposé, rien de tel ici. Il n'y aura pas de bascule obligatoire et simultanée partout dans le monde, mais plutôt une évolution progressive, sans remise en cause significative de l'existant. Interview de Christophe Pousset, chez ActivNetworks, par Boris Manenti
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