Contrôlé positif en juillet dernier mais blanchi par la fédération espagnole en février, Alberto Contador a, d'un strict point du vue juridique, parfaitement le droit de courir même si le Tribunal arbitral du sport (TAS) doit encore trancher cet été sur l'affaire de son «steak contaminé». Et le champion espagnol ne s'en prive pas depuis le 16 février, date à laquelle sa suspension provisoire a été levée: il a enchaîné les victoires au Tour de Murcie, au Tour de Catalogne, puis au Tour d'Italie, avant de s'attaquer à défendre son titre dans le Tour de France à partir de samedi.
L'affaire Contador en cinq dates -30 septembre 2010: Deux mois après son troisième sacre dans le Tour de France, Alberto Contador révèle qu'un de ses contrôles antidopage durant l'épreuve a donné un résultat anormal. Les traces d'un produit interdit pour ses effets anabolisants sont si infimes qu'elles rendent le cas complexe: résultent-elles d'une contamination alimentaire comme le clame Contador, qui se dit victime d'un steak de boeuf acheté à Irun? Ou bien les restes d'une prise de produit dopant? L'Union cycliste internationale (UCI), mène des investigations qui l'amèneront à demander en novembre à la Fédération espagnole d'ouvrir une procédure disciplinaire. -26 janvier 2011: après examen du dossier, la Fédération espagnole fait savoir à Contador qu'elle envisage de lui infliger un an de suspension, ce qui revient à lui faire perdre son troisième titre dans le Tour de France. -15 février 2011: la décision de la Fédération espagnole tombe... Revirement spectaculaire: Contador est blanchi. Le coureur se félicite que «son honneur soit reconnu et que justice soit faite», et reprend aussitôt la compétition, au Tour d'Algarve. -24 mars 2011: l'Union cycliste internationale annonce qu'elle fait appel de la décision espagnole devant le Tribunal arbitral du sport (TAS). -26 mai 2011: le Tribunal, qui avait promis de rendre une décision dans l'affaire avant le Tour de France, se heurte au calendrier des parties. L'affaire qui devait être entendue du 6 au 8 juin est finalement reportée au début août, du 1er au 3. Alberto Contador est donc libre de courir le Tour de France, au risque d'être déclassé de l'épreuve 2010 et 2011 si le TAS le décide.Autant d'efforts pour rien, peut-être. Car Alberto Contador pourrait très bien perdre ses trophées, à commencer par sa victoire dans la Grande Boucle 2010, si le TAS juge, à l'inverse des Espagnols, que les quelques picogrammes de clenbutérol décelés dans ses urines le 21 juillet 2010 sont bien dus au dopage.
Le coureur clame son innocence
Quelques picogrammes représentent des traces infinitésimales, loin des contrôles positifs caricaturaux, d'où la complexité de l'affaire. Alors que la plupart des laboratoires antidopage n'auraient pas été capables de les détecter, ces picogrammes n'ont pas échappé l'an dernier à celui de Cologne (All), connu pour être l'un des plus performants. Le coureur espagnol a clamé son innocence et désigné pour coupable un steak mangé la veille de son contrôle, provenant d'un ravitaillement à Irun, au risque de se froisser avec les producteurs bovins espagnols: ceux-ci ont porté plainte contre X.
Dans le même temps, certains médias rapportaient, sans donner leur source, que les mêmes urines de Contador présentaient une concentration de résidus plastiques élevée, caractéristique des personnes ayant reçu une transfusion sanguine. Cet élément, qui n'a jamais été confirmé depuis, laisse supposer à certains experts que Contador se serait piégé en se dopant par transfusion sanguine.
Le test de détection des résidus plastiques n'est pas encore validé par l'Agence mondiale antidopage (AMA), mais ses résultats peuvent étayer un faisceau de preuves. Figure-t-il dans le dossier Contador porté en appel par l'UCI et l'AMA ? Mystère. Les éléments à charge ne seront connus qu'une fois le jugement du TAS rendu, probablement en septembre.
Une justice très lente
À ceux qui déplorent la durée de la procédure, le cyclisme ne peut que rappeler que la justice sportive fonctionne au rythme qui est le sien, avec un cadre juridique à respecter. L'UCI a attendu quatre mois après le Tour, pour demander en novembre à la Fédération espagnole d'ouvrir une procédure disciplinaire contre Contador. Il fallut trois mois à celle-ci pour la mener à terme et décider en février d'absoudre le coureur de toute faute, après avoir songé à lui infliger un an de suspension.
L'UCI prit ensuite un autre mois avant de faire appel devant le TAS, pour dit-elle obtenir un jugement épargné de toutes pressions politiques, suivie quelques jours plus tard par l'AMA. La cour suprême du sport, basée à Lausanne, avait bien promis de statuer sur le sort du coureur avant le départ du Tour, mais elle a dû reporter l'audience après la fin du Tour, du 1er au 3 août, à la demande des parties.
Cette situation cause un malaise dont se serait bien passée la Grande Boucle. Tout en regrettant «l'incertitude qui va accompagner la présence d'Alberto Contador au Tour de France», l'UCI a invité tout un chacun à respecter le droit du coureur espagnol à la présomption d'innocence, jusqu'à décision contraire.
(L'essentiel Online/AFP)
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