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Mardi, 27 Décembre 2011 08:16

Avec presque 1 milliard de dollars sur la table, le deal Google/Mozilla fait parler de lui

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La semaine dernière, Mozilla avait annoncé le renouvellement de son accord avec le géant de Mountain View, se refusant de divulguer la somme que Google avait accepté d’engager. Ces chiffres ont néanmoins été révélés, et représenteraient presque 1 milliard de dollars.

Avec presque 1 milliard de dollars sur la table, le deal Google/Mozilla fait parler de lui

$300,000,000

Le chiffre a été révélé la semaine dernière par le site web AllThingsD, deux jours seulement après l’annonce faite par Mozilla du renouvellement de son accord avec Google, afin que le moteur de recherche de ce dernier soit celui proposé par défaut dans Firefox. 300 millions de dollars par an, soit presque un milliard pour les trois années sur lesquelles porte l’accord.

En 2010, 84% des revenus de la Mozilla Foundation (123 millions de dollars) provenait de leur précédent accord avec Google, alors signé en 2008 et expiré fin novembre de cette année. La somme concernée par ce nouvel accord est néanmoins 3 fois plus importante.

Yahoo et Microsoft se seraient apparemment eux aussi approchés de cet accord, mais n’auraient pu enchérir sur la proposition faite par Google. A ce sujet, on se demande d’ailleurs pourquoi les deux sociétés ne se sont pas alliées, le moteur de recherche de Yahoo étant en effet très fortement lié à Bing… Qui sait alors jusqu’où Google était prêt à aller dans cette guerre de position.

Maintenant, la question que tout le monde est en droit de se poser : que va devenir cet argent ? Le scénario le plus probable tient en un seul mot : développement. Encore et toujours plus de développement. Il s’agit en effet d’un domaine dans lequel Mozilla investit énormément depuis quelques années. Comme le reporte Steven J. Vaughan-Nichols sur ZDNet, les chiffres concernant le développement de Firefox sont en constante augmentation : 31,3 millions de dollars en 2008, 40,2 en 2009 et 62,8 en 2010.

L’expansion de devices tels que les smartphones et tablettes constitue en effet la cause principale du besoin de ressources (j’entends ici ressources financières) pour les sociétés de développement de navigateurs. En plus d’être présents sur les ordinateurs, ceux-ci doivent maintenant s’adapter aux différentes plateformes qui se présentent sur ce marché.

Pour revenir à Firefox — et à un exemple concret –, la Mozilla Foundation a lancé récemment une mise à jour de la version tablette de son navigateur pour Android, introduisant un tout nouveau design. Le navigateur est par la même occasion disponible pour tout appareil tournant sous iOS.

Le fonds fourni par Google va donc probablement permettre à Mozilla d’intensifier ses efforts dans cette laborieuse conquête du monde du mobile.

De même, on a pu assister au cours de cette année 2011 à un véritable emballement en ce qui concerne les sorties de nouvelles versions du navigateur Firefox. Le browser est en effet passé de la version 4.0 en mars à la 9.0 ce 20 décembre — notons d’ailleurs la publication extrêmement rapide de la version 9.0.1, en réponse à un bug soulevé dans la version 9.0 (*) — permettant au navigateur de rester dans la compétition.

On ne peut qu’espérer voir sortir d’un tel accord un Firefox renforcé et stable, avec certainement un investissement plus prononcé sur l’amélioration de la qualité du produit.

Toujours est-il que, selon Mozilla, l’accord serait clairement gagnant-gagnant pour les deux parties. Alors, qu’a donc Google à y gagner ?

Comme vous pouvez vous en douter, cet accord et — surtout — la somme qui en découle ont fait couler beaucoup de pixels sur la toile la semaine dernière.

(*) Le bug concerné était la cause de nombreux crash sous Windows, Mac et Linux (ce qui concerne du coup pas mal d’ordinateurs). Le problème, exposé sur BugZilla (plateforme de rapports de bugs de Mozilla),  La correction a été faite une journée seulement après le lancement de la version 9.0 de Firefox (la version en cours étant de ce fait la 9.0.1).

MICROSOFT ?…

La cible de Google ? A n’en pas douter, il s’agit avant tout de Microsoft, et principalement de son navigateur Internet Explorer, qui règne depuis toujours sur le marché des browsers. Le moteur de recherche de la firme de Redmond est bien entendu lui aussi visé.

L’explication est assez simple. L’accord a donné accès au moteur de recherche de Google à deux navigateurs du top 3, qui représentent plus de la moitié des utilisateurs de navigateurs dans le monde — Chrome et Firefox possèdent pour l’instant chacun 25% des parts. Cela permet donc de garder à distance le moteur de recherche Bing — malgré tous les efforts fournis par Microsoft pour étendre sa présence –, et encore plus celui de Yahoo. Bien que ces deux moteurs de recherche restent en option dans Firefox, c’est Google qui, irrévocablement, domine.

La seule chose, lorsqu’on y réfléchit, c’est que Google et Mozilla jouent tous les deux dans la cour des navigateurs. Et c’est là que se soulève une question assez troublante… Pourquoi une firme telle que Google, qui voit son navigateur monter en puissance, serait alors prête à débourser des sommes si importantes (certes, peut-être pas aussi importantes de leur point de vue) pour l’un des principaux concurrents de son navigateur ?

… OU ANTITRUST ?

Comme dit précédemment, Firefox est un navigateur autant utilisé que Chrome, regroupant de ce fait une base de plusieurs millions d’utilisateurs. Avec un tel accord, une écrasante majorité des utilisateurs de Firefox sera “par défaut” utilisatrice de Google (Search). N’oublions alors pas qu’une très grande partie des revenus de Google provient de la publicité, grâce à son fameux système AdWords… Ces utilisateurs valent de l’or pour Google.

Qui plus est, le précédent accord avait été signé avant la sortie de Chrome. On aurait donc justement pu s’attendre à une somme inférieure au vu de la popularité du navigateur de Google. Chrome a par la même occasion mangé pas mal de parts de Firefox depuis son apparition. Le navigateur de Mozilla est en effet passé depuis peu à la troisième place du classement des navigateurs les plus utilisés (source : StatCounter).

Avec presque 1 milliard de dollars sur la table, le deal Google/Mozilla fait parler de lui

Une hypothèse intéressante soulevée par David Ulevitch, CEO d’OpenDNS, et évoquée par MG Siegler — rédacteur sur TechCrunch — sur son blog personnel parislemon, est alors celle de la loi antitrust. En finançant de la sorte la Mozilla Foundation, Google se garderait à l’écart d’accusations de comportement anti-concurrentiel.

On remarque en effet que le géant d’Internet utilise depuis pas mal de temps son produit principal et universellement connu, Google.com, afin de promouvoir ses autres produits, notamment son navigateur.

En plus de cela, si le système d’exploitation de la firme de Mountain View, Chrome OS — qui, pour rappel, est entièrement basé sur Chrome –, venait à fonctionner à merveille, la compétition pour Google risquerait de prendre un tout autre goût.

Il en est de même pour les smartphones et tablettes tournant sous Android. Le navigateur installé pour l’instant par défaut n’est qu’un générique, mais il y a fort à parier que dans les années à venir celui-ci finisse par céder sa place à Chrome. Google aurait ainsi un système d’exploitation dominant le marché, et imposant Chrome à ses utilisateurs.

Souvenez-vous. C’est à ce genre d’accusations que Microsoft a dû répondre avec Internet Explorer. Le navigateur étant en effet installé par défaut sur leur système d’exploitation, la concurrence y voyait un acte de véritable monopolisation du marché.

D’une certaine manière, Google chercherait ainsi à, comme le dit si bien Siegler, “payer pour rester”.

SEULEMENT PARTENAIRES.

La réponse de Google a été assez rapide. Peter Kasting, un ingénieur de l’équipe Chrome, a décidé de réagir sur Google+. Celui-ci affirme alors que Google et Mozilla ne sont que partenaires, et en aucun cas concurrents.

Selon l’ingénieur, Chrome a été développé dans le but de faire évoluer le Web le plus vite possible. La Mozilla Foundation a d’après lui le même objectif, et il est ainsi normal que Google participe à l’aide financière pour le développement de Firefox.

Kasting affirme que Google supportait en effet Firefox avant que Chrome ne soit développé. Google ne fonctionnerait bien (comprenez : Google ne se fait de l’argent) que si le Web lui-même se porte bien. Google maintiendrait ainsi en vie, et dans toute sa bonté, un acteur phare du Web.

Un meilleur Web, auquel Firefox contribue, rend donc Google plus fort.

Pas sûr que tout le monde arrive à avaler ces bonnes paroles, qui paraissent tout droit sorties d’un monde merveilleux où un marché sur lequel reposent des millions de dollars n’est en aucun cas lieu de concurrence…

Nous offrant un bien bel oxymore, Google et Mozilla seraient donc des “partenaires concurrents” pour un Web toujours meilleur, tous deux alliés face au mastodonte Microsoft et à sa lourde infanterie. Mais pour combien de temps encore ? Peut-être finirons-nous un jour par connaître le fin mot de cette histoire…

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