Deux hebdomadaires français, Le Nouvel Observateur et Le Point, publient dans leurs éditions de cette semaine, des morceaux choisis de cet ouvrage («Le temps présidentiel», Editions NiL). Ce second tome rompt avec le premier «Chaque pas doit être un but» où l'ancien chef de l'État, qui retraçait sa vie depuis sa naissance en 1932 jusqu'à son accession à la présidence de la République en 1995, n'était guère acerbe vis-à-vis de son successeur.
Les relations entre les deux hommes n'ont pas toujours été cordiales.Là, à mots feutrés, parfois dans l'implicite, Jacques Chirac revient sur les affronts que lui a infligés Nicolas Sarkozy. À propos d'une mise en cause de sa belle-famille, quelques mois avant la présidentielle de 1995, «dans l'affaire des terrains de Vigneux», il écrit: «il m'a toujours manqué la preuve qu'elle avait été initiée par le ministre du Budget» Nicolas Sarkozy (alors porte-parole d'Edouard Balladur, ndlr).
«Ses ambitions présidentielles sont vite devenues transparentes»
Au lendemain du premier tour de la présidentielle de 2002, Jacques Chirac estime que «Nicolas Sarkozy paraît le mieux préparé à occuper la fonction» de Premier ministre. Il y renonce car «il subsiste trop de zones d'ombres et de malentendus» entre eux. Il lui reconnaît «une qualité indéniable: celle d'avancer toujours à découvert». «Ses ambitions présidentielles sont vite devenues transparentes, à peine est-il arrivé Place Beauvau (en 2002), quitte à paraître anticiper quelque peu sur des échéances qui n'étaient pas immédiates. Mais je me suis aussitôt refusé à entrer dans le rapport de forces qu'il tentait d'établir entre nous, considérant que celui-ci ne pouvait être que destructeur pour nos institutions».
En 2004, après l'échec aux régionales, l'hypothèse de Nicolas Sarkozy à Matignon refait surface. Il la rejette, car «si Matignon et l'Elysée ne s'entendent pas, c'est l'implosion». «C'est ce qui se passerait inévitablement avec Sarkozy». Jacques Chirac garde un souvenir aigre de déclarations de Nicolas Sarkozy ironisant sur les amateurs de Sumo et dénigrant le Japon, deux de ses passions, des «petites phrases provocantes décochées contre moi par un ministre en fonction qui s'exprime à sa guise, sans se soucier de ménager le chef de l'État». «Mais réagir à cela, du moins en public, ne pouvait que conduire à un affrontement auquel, je persistais à le penser, il n'eût pas été digne pour le président de la République de se prêter».
«Au fond de moi, je suis touché»
Des déclarations de Nicolas Sarkozy en 2005 sur le «Kärcher» et ses promesses de débarrasser Argenteuil de ces «racailles», M. Chirac écrit qu'il n'a «pas approuvé les déclarations intempestives du ministre de l'Intérieur». En 2007, alors qu'il a apporté son soutien à Nicolas Sarkozy un mois avant la présidentielle, Jacques Chirac écrit que le soir de l'élection avec ses proches «chacun de nous écoute avec la plus grande attention chaque phrase, chaque mot qu'il prononce guettant secrètement le moment où il citera sans doute le nom de celui auquel il s'apprête à succéder, ou même le remerciera du soutien qu'il lui a apporté». «Mais, ce moment ne viendra jamais. Pour ma part, je m'abstiens de manifester la moindre réaction. Mais au fond de moi, je suis touché et je sais désormais à quoi n'en tenir».
Dans cet ouvrage, Jacques Chirac concède «une erreur» après le 21 avril 2002: «J'aurais sans doute dû tout mettre en œuvre pour constituer une équipe dirigeante plus représentative des 82% d'électeurs qui m'ont apporté leur suffrage le 4 mai 2002». «Je ne l'ai pas fait et ce fut probablement une erreur au regard de l'unité nationale dont j'étais le garant».
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