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Friday, 11 February 2011 08:06

Mobilisation en Egypte Moubarak s'accroche, la foule furieuse

Mobilisation en Egypte Moubarak s'accroche, la foule furieuse

Après une journée de rumeurs annonçant son départ, le président égyptien Hosni Moubarak a refusé jeudi soir de démissionner, dénonçant des «diktats» étrangers. Dans un discours à la nation, il a toutefois annoncé qu'il déléguait ses prérogatives à son vice-président, déclenchant la fureur des manifestants.

«J'ai décidé de déléguer au vice-président les prérogatives du président de la République conformément à ce que dit la Constitution», a déclaré M. Moubarak dans son allocution d'une vingtaine de minutes. Il avait la voix parfois tremblante, visiblement affecté.

«Je suis conscient du danger que représente cette croisée des chemins (...) et cela nous impose de faire passer d'abord les intérêts supérieurs de la nation», a affirmé M. Moubarak. Il n'a donc pas annoncé sa démission en tant que chef de l'Etat comme l'exigent depuis plus de deux semaines des centaines de milliers de manifestants à travers tout le pays.

«La transition du pouvoir va d'aujourd'hui à septembre», a-t-il ajouté. Il faisait référence à la date de l'élection présidentielle à laquelle il a promis de ne pas se présenter.

Constitution amendée

M. Moubarak a en outre annoncé l'amendement de cinq articles controversés de la Constitution et l'annulation d'un sixième article. Ces articles imposent notamment des conditions très restrictives de candidature à l'élection présidentielle, ou permettent de se représenter à la présidence sans limitation du nombre de mandats.

Il a également répliqué aux appels répétés de plusieurs pays occidentaux, dont les Etats-Unis et l'Union européenne, à une transition du pouvoir pacifique du pouvoir en Egypte. «Je ne me suis jamais plié aux diktats étrangers, j'ai toujours préservé la paix et oeuvré pour l'Egypte et sa stabilité», a-t-il dit.

«Je n'ai jamais recherché le pouvoir», a-t-il répété, en déclarant vouloir être «enterré en Egypte», sous-entendant qu'il ne prendrait pas le chemin de l'exil comme l'a fait l'ex-président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali sous la pression populaire.

Souleimane président «de facto»

Le vice-président Omar Souleimane s'est un peu plus tard adressé lui aussi à la nation. Récemment nommé à ce poste non pourvu depuis 1981, Il a appelé un peu plus tard les protestataires à rentrer chez eux, en s'engageant à «préserver la sécurité» et la «révolution des jeunes».

«Le changement a commencé, les décisions constitutionnelles ont été prises», a déclaré M. Souleimane. «Après que le président m'a chargé de cette responsabilité nationale, celle de préserver la sécurité et la stabilité de l'Egypte (...), je demande à tout le monde de participer en vue de parvenir à cet objectif», a-t-il ajouté.

«Empruntons une nouvelle voie pour réaliser les espoirs de toutes les générations (...). Jeunes d'Egypte, héros d'Egypte, rentrez chez vous», a-t-il ajouté. «Je m'engage à (...) préserver la révolution des jeunes (...) et à réaliser les revendications du peuple», a poursuivi M. Souleimane.

L'ambassadeur égyptien aux Etats-Unis Sameh Choukri a affirmé jeudi sur CNN que M. Souleimane était désormais le «président de facto» d'Egypte. Il a déclaré que M. Moubarak lui avait transmis tous ses pouvoirs.

Déception et fureur

Le discours télévisé du Raïs, très attendu, a provoqué la déception et la fureur parmi les quelque 200 000 manifestants réclamant son départ immédiat place Tahrir, au Caire, épicentre du mouvement. Des centaines de manifestants ont aussitôt brandi leurs chaussures en direction de l'écran sur lequel était retransmis le discours du président, geste insultant et méprisant dans le monde arabe, en chantant «A bas Moubarak! Dégage, dégage!». D'autres ont appelé à une grève générale immédiate en réclamant que l'armée, qui s'est déployée en force autour des manifestants prenne position: «Armée égyptienne, il faut faire un choix, le régime ou le peuple!».

Un départ de M. Moubarak, qui règne sur l'Egypte depuis près de 30 ans, a fait l'objet d'intenses spéculations pendant les heures précédant le discours, alimentées par l'annonce de l'armée qu'elle examinait les «mesures» nécessaires «pour préserver la nation» et «appuyer les demandes légitimes du peuple», ce qui avait laissé penser qu'elle pourrait prendre le pouvoir. Certains Egyptiens ont considéré cette intervention comme un coup d'Etat militaire après deux semaines de manifestations sans précédent. Les violences ont fait environ 300 morts selon un bilan de l'ONU et Human Rights Watch depuis le début du mouvement.

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