Qu'est ce que la binationalité? Depuis quand est-elle acceptée en France?
Patrick Weil: «La double nationalité est un phénomène international qui est aujourd'hui largement développé et admis. Il est impossible de la quantifier précisément. Elle est le produit direct d'un phénomène qui s'est développé surtout dans la deuxième partie du XXe siècle: l'égalité hommes-femmes.
Auparavant la femme perdait sa nationalité lorsqu'elle épousait un homme d'une autre nationalité: maintenant elle la conserve et ses enfants récupèrent à la fois la nationalité de la mère et du père. La France, elle, a toujours accepté la double nationalité, comme le Royaume Uni. Après la Première Guerre Mondiale, lors de la réintégration de l'Alsace-Moselle dans la République française, certains Allemands installés dans la région voulaient devenir Français tout en gardant aussi leur nationalité d'origine. Cela n'a posé aucun problème. Cela marquait notre confiance en nous-mêmes».
Existe-t-il des restrictions pour les binationaux en France en matière de droit ou d'accès à l'emploi?
«Juridiquement, si par exemple vous êtes Franco-Américain résidant en France, vous ne pouvez pas vous réclamer de la nationalité américaine quand vous êtes en France. Mais aucun métier n'est fermé aux binationaux. C'est une pleine nationalité française».
Que pensez-vous du débat sur la place des binationaux dans le football français?
«C'est un faux débat tenu par des gens bons en foot, et incompétents en droit et en politique. La FFF n'a pas à définir le droit de la nationalité. Il y a un principe dans la République, c'est l'égalité devant la loi. Ces joueurs binationaux sont français. Si on leur offre une place dans l'équipe de France, ils y vont tout de suite. Si on leur dit non et que l'équipe de l'autre pays les invite à jouer tous les quatre ans, quel est le problème? Quel en est l'effet, sinon de valoriser la formation, la culture, la langue françaises?
Ce débat est paradoxal, parce qu'au moment de la crise de l'équipe de France (en Afrique du Sud), il y a avait deux interprétations: soit c'était une bataille "raciale" ou "religieuse" entre joueurs, soit c'était un problème de gestion (de l'ancien sélectionneur Raymond Domenech, ndlr). Laurent Blanc a montré que c'était un problème managérial puisque, avec les mêmes joueurs, il a fait une bonne équipe. Avec ses propos, il semble désormais donner raison à la première explication».
Propos recueillis par Daphné Benoit
(L'essentiel Online/AFP)
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