«Ce n'est que l'illustration des dérives possibles que nous dénonçons depuis plusieurs années», a regretté Nicolas Comte, secrétaire général du syndicat policier USGP-FO qui n'a pu visionner le reportage diffusé jeudi soir sur France 2.
«Un véritable problème»
«Cela démontre un véritable problème aujourd'hui: cette histoire de la sous-traitance de la sécurité à des sociétés privées», a-t-il ajouté.
Depuis maintenant de nombreuses années, l'Etat a progressivement conféré aux sociétés de sécurité privée de nombreuses tâches qui incombaient auparavant aux agents publics, comme la surveillance des stades ou la fouille dans les aéroports, transférée, elle, au début des années 90 au privé.
La tendance est telle - avec une croissance de près de 3% par an pour un chiffre d'affaires de près de 10 milliards d'euros - que d'ici dix ans, selon les experts, le nombre de salariés du privé, qui est aujourd'hui de près de 170.00O, pourrait dépasser celui des agents publics (environ 240.000 entre la police et la gendarmerie).
«Le but des sociétés privées, c'est de faire de l'argent»
«Le but des sociétés privées n'est pas forcément la sécurité, c'est de faire de l'argent», a insisté M. Comte.
Lacunes dans la formation, manque de professionnalisation, absence de label qualité... Les professionnels du secteur demandent que la sécurité privée, qui s'est développée de façon «parfois anarchique», selon une source proche du secteur, soit mieux encadrée.
La loi sur la sécurité intérieure (Loppsi II) qui doit passer en janvier en deuxième lecture au Sénat vise justement à l'encadrer de façon plus stricte. Elle prévoit notamment la création d'un Conseil national des activités de la sécurité privée et une intensification des contrôles pour la délivrance d'une carte professionnelle.
Contrôle accru de l'État
«Mais c'est encore trop timide», assure une source syndicale dans la police. Toutefois, certains syndicats policiers refusent d'inverser une tendance assumée par le président Nicolas Sarkozy, qui avait évoqué fin 2008 la «coproduction» en matière de sécurité.
Le syndicat de police Alliance a estimé que cet épisode ne remettait «absolument pas en question la nécessité de transférer certaines missions de sécurité à des acteurs privés».
Même chose pour le syndicat Synergie-Officiers, pour qui la police «ne peut pas se substituer aux sociétés de sécurité privées pour les fouilles dans les aéroports», selon son secrétaire général Patrice Ribeiro: «on ne peut pas revenir en arrière». Mais les deux syndicats réclament «un contrôle accru de l'Etat».
Le recours au privé a des avantages économiques non négligeables à l'heure de la réduction des dépenses publiques.
Pas de meilleurs résultats aux USA
«Le problème de cet épisode n'est pas tant les sociétés privées de sécurité, cela a trait surtout à la sécurité dans les aéroports», a tempéré le professeur en criminologie Alain Bauer.
«Aux Etats-Unis, ce sont des agents publics qui sont chargés des fouilles et leurs résultats ne sont pas forcément meilleurs. C'est tout le système des fouilles et des systèmes de contrôle aux aéroports qu'il faut repenser», a-t-il estimé.
Nicolas Comte demandé d'ailleurs la tenue d'un audit sur la sécurité aéroportuaire.
L'essentiel Online avec AFP
Authors: L'essentiel